LES OSSEMENTS RETROUVÉS SUR LES SITES SOLUTRÉENS CHARENTAIS.
Le tableau suivant présente un bilan des différentes espèces animales présentes sur les sites solutréens charentais.
Sur l'ensemble des sites, on note la présence systématique et le plus souvent dominante du renne et du cheval. Ces deux espèces devaient représenter l'une des sources essentielles de l'alimentation des solutréens charentais.
► Au Paléolithique supérieur, la présence des chevaux (Equus caballus gallicus) est liée au "développement des espaces découverts généralement occupés par des prairies à graminées" (Renault-Miskovsky, 1991).
► Le renne (Rangifer tarandus) est adapté à la vie dans un environnement de toundra et de taïga (on le retrouve aujourd'hui en milieu arctique). La fréquence de cette espèce dans les différents gisements du Paléolithique supérieur français explique de cette période a été appelée "l'Âge du renne" par de nombreux archéologues (Lartet, ...).
(rennes sur la toundra près de Ny-Ålesund, Norvège)
► L'antilope saïga (Saiga tatarica), qui vit actuellement dans les steppes arides de l'Asie centrale, est présente sur plusieurs gisements. Durant le Paléolithique supérieur, elle s'installe, lors des périodes extrêmement froides comme se fut le cas du Solutréen, dans les régions très découvertes.
► On note aussi la présence de l'auroch (Bos primigenius) et du bison (Bison priscus) dans la faune solutréenne charentaise consommée.
Ces cinq espèces (cheval, renne, saïga, auroch et bison) sont classées par Bordes parmi la "faune froide du Würm III" (1992).
► Les ossements des gisements de la Chaire-à-Calvin et de la Chaise de Vouthon permettent de soulever le problème de la chasse au rhinocéros au Paléolithique. Pour Guérin et Faure (1983), l'analyse des armes alors disponibles montre qu'"aucune ne possédait le pouvoir vulnérant suffisant pour abattre un représentant adulte et en bonne santé", ces animaux étant trop puissants.
Aussi, est-il très vraisemblable que les ossements retrouvés provenaient soit du piégeage, soit de charognage, soit de l'abattage occasionnel d'individus sans défense comme des juvéniles ou des adultes malades ou blessés.
► Le cas particulier des petits vertébrés.
Les ossements des animaux de plus petite taille, tels les léporidés, les petits carnivores ou les oiseaux, ou encore les poissons, ne laissent pas systématiquement d'indices : leurs ossements se conservent très difficilement dans les gisements préhistoriques. Ainsi, ces petits animaux sont systématiquement sous-évalués dans les échantillons dont disposent les archéozoologues.
• Fontana (2004) s'est penché sur le cas du
Lièvre variable (Lepus timidus), qui reste peu représenté, et semble avoir été peu exploité.
Pour Fontana, sa capture restait plutôt opportuniste, bien que le lièvre variable pouvait être exploité pour différents produits (viande, graisse, fourrure, os). Il estime que son statut dans l'économie variait selon les saisons, en raison d'une variation des produits obtenus au cours de l'année : en effet, on note chez le lièvre variable d'importantes variations annuelles du poids de la viande, du taux de matières grasses, de l'épaisseur et de la couleur de la fourrure. Néanmoins, l'étude cémento-chronologique ne permet pas, comme c'est le cas pour d'autres espèces, de dater la saison de l'abattage.
D'après les fouilles archéologiques, la
part des lagomorphes dans le régime alimentaire des groupes humains commence à augmenter à partir du Gravettien et du Solutréen, mais ne prendra une importance réelle qu'au cours du Magdalénien (Brugal, 2000). Il ne s'agirait donc pas d'un apport complémentaire, mais plutôt d'un apport marginal : "c'est à ce titre qu'on peut penser que la viande et la graisse du lièvre variable n'ont probablement pas constitué la motivation première à cette acquisition" (Fontana, 2004).
• Des ossements de
Renards sont régulièrement découverts, ainsi que des canines perforées utilisées comme éléments de parure.
• La place des
oiseaux dans les ensembles archéologiques est très variable selon l'époque et la région.
Il faut noter la probable utilisation des matières premières aviaires à des fins non-alimentaires :
→ les ossements, utilisés comme flûtes, perles, tubes ou épingles ;
→ les plumes vraisemblablement utilisées en parure (il existe d’innombrables exemples ethnologiques, mais aucune preuve archéologique : la plume est un phanère putrescible dont le prélèvement ne laisse aucune traces sur les os...).
Ainsi, bien que les petits vertébrés aient été chassés, leur exploitation alimentaire semble avoir été accessoire. Leur utilisation aurait concerné en priorité :
→ les supports d'outils ou d'art mobilier ;
→ les parures (surtout les renards) ;
→ l'exploitation des peaux et des fourrures, des plumes (ce qui est particulièrement difficile à mettre en évidence archéologiquement, du fait de la non-conservation de ces matières).
Tableau de chasse paléolithique :
Exposition Namur, juin 2007.