Contexte climatique.
Le climat est un élément majeur pour la connaissance d'une population préhistorique, puisqu'il détermine "la composition de la flore et la présence/absence de certains animaux", agissant ainsi de façon indirecte "sur le comportement humain"
(Mohen et Taborin, 1998).
► Le Solutréen correspond au contexte climatique de froid et de sécheresse de la dernière glaciation, appelée, dans la chronologie alpine, glaciation de Würm.
"La température moyenne annuelle était très basse et, bien que les estimations varient selon les sources, il semble possible d'avancer qu'elle a pu se situer aux alentours de 0°c. Le sol est alors entièrement glacé une grande partie de l'année (Pergélisol : sous-sol gelé en profondeur dont seule la partie superficielle dégèle en été), ainsi que l'analyse micro-morphologique de lames minces des sols l'a montré" (Clottes, La France Préhistorique, 2010).
Ainsi, des données paléoclimatiques récentes ont montré qu'au Solutréen "les températures du mois le plus chaud de l'année [étaient] inférieures de 10°c à celles des climats européens actuels, [...] et pour le mois le plus froid, en Europe de l'Ouest, inférieures d'environ 20°c par rapport au climat actuel" (Renard, 2010).
Cependant, "il est erroné de considérer que le Solutréen a été entièrement marqué par la rigueur climatique du dernier maximum glaciaire" (Clottes, 2010). La progression du froid ne se fait pas d'une manière continue : les périodes de froid intenses sont entrecoupées d'épisodes plus cléments : "l'établissement de courbes de variation de la température permet d'observer de multiples phénomènes climatiques tempérés ou froids très bref, de l'ordre du siècle" (Clottes, 2010).
Et même au cours des périodes froides, "en France les glaciers ne sont guère développés que sur les massifs montagneux" (Leroyer, 1991).
Ainsi, "dans le contexte du Dernier Maximum Glaciaire de l'Europe occidentale, le climat demeurait froid mais pouvait connaître des périodes d'instabilité abrupte et soudaine marquées par des épisodes inter-stadiaires de « réchauffements ». Des « réchauffements » qui demeuraient cependant froids par rapport au climat actuel" (Renard, 2010).
► Un des traits climatiques essentiels du Solutréen était aussi "l'existence, en toutes saisons, de vents violents soufflant des calottes glaciaires vers les régions périglaciaires" (Pitte, 1989).
► En Charente, le Solutréen marque la disparition des forêts denses aux sous-bois humides et des marécages permanents. Le paysage solutréen charentais était celui d'une "steppe froide ressemblant à la steppe actuelle de la Volga et de l'Amour" (Guillien, 1943).
C'est la
Toundra, caractérisée par la présence de
dryade octopétale (
Dryas octopetala), une plante qui a donné son nom à une des dernières périodes climatiques du Würm. Elle est accompagnée d'armoises (genre
Artemisia, regroupant des herbacées, des arbrisseaux et des arbustes ; exemple :
Artemisia glacialis L.), de plantes herbacées de la famille des
chenopodiaceae, de
Graminées, du
bouleau nain (actuellement présent dans de nombreuses régions arctiques) et du saule polaire, ces deux arbustes poussant à l'horizontale, au plus près du sol.
Betula nana L, photo Mathieu MENAND, Finlande, 2009. Les solutréens charentais vivaient donc dans de grands espaces découverts "où abondaient graminées et armoises" (Leroyer, 1991), ce qui n'excluaient pas la présence de prairies grasses le long des fleuves, ainsi que de quelques bouquets d'arbres, essentiellement des résineux, dans les zones abritées au pied d'abrupts rocheux ou le long des cours d'eau.
► Ces contraintes climatiques ont eu également des répercussions sur les espèces animales présentes au Solutréen, les zones habitables lors du dernier maximum glaciaire en Europe étant réduites : "pendant le maximum glaciaire, les biocénoses européennes les plus froides disposaient d'un espace assez limité. La grande plaine nord-européenne était totalement dépeuplée. La situation géographique des gisements ayant livré du Solutréen montre clairement qu'en Europe de l'Ouest, seul le quart sud-ouest de la France était encore habitable" (Delpuech, 1999).
D'autre part, Françoise Delpuech a montré (Biomasse d'Ongulés au Paléolithique et inférences démographiques, Paléo, 1999) que les ongulés ont vu leur taille et leurs effectifs nettement réduits lors des pics de froids les plus intenses.
"La diminution d'effectif constitue une réponse adaptative de la population à des conditions devenant peu favorables ; elle peut précéder la disparition de l'espèce de la région concernée" (ibid.).
Les conditions climatiques du Solutréen ont fait que les zones habitables ont constitué des isolats de populations, comparables à des populations insulaires ; or, "les espèces insulaires se caractérisent sur le plan morphologique par une taille moyenne plus faible que leurs homologues continentaux" (ibid.), ce qui correspond aux observations archéozoologiques.
À suivre : Les Sites Solutréens Charentais.